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Annus horribilis
22 juin 2011

♫ no country for soldes men ♪

***edit : reprise d'un vieux post que j'avais publié ailleurs, pour l'occasion, et que certains connaissent déjà. *** 

 

Samedi 10 janvier 2009. Une date comme une autre, à priori.
Les galeries Lafayette. Un lieu comme un autre, à priori.
Sauf que ce samedi là, aux galeries Lafayette comme dans tout le reste de notre petit territoire gaulois, peuplé d'irréductibles radins perpétuellement en quête du moindre sou-sou à économiser ….c'est les soldes !

Lafayette. Avec un nom pareil, j'aurai dû me méfier. « si tu ne viens pas à Lafayette, la faillite viendra à toi .. » ; Et moi je suis allé galérer aux galeries Lafayette pour acheter ma layette.

Comme chacun sait, les soldes c'est l'un des rares champs de bataille entièrement dédié aux femmes. La totalité des grands stratèges et les plus grands experts de cette guerre des nerfs sont …des femmes. C'est pourquoi on parlera de soldates, n'en déplaise à certains mâles émancipés. L'homme n'y a pas sa place, il n'est pas équipé pour. Et il le sait. C'est pourquoi on ne trouve que deux types d'hommes les jours de soldes. Celui qui est venu accompagner madame et celui qui est venu par hasard, n'ayant pas été foutu de remarquer les panneaux publicitaires qui lui ont pourtant hurlé tout le long de son trajet « ATTENTION CRETIN, N'Y VA PAS : C'EST LES SOLDES ! »

La première race d'homme est venu là pour sortir bobonne (un peu comme on promène le chien, le dimanche à la campagne), pour lui permettre de se dégourdir les pattes. Passé la porte d'entrée, c'est donc tout naturellement qu'on peut les voir s'arrêter, et murmurer un truc à l'oreille de la chère et tendre, puis se reculer vivement. C'est ce qu'on appelle le « lâcher de bobonne » ; La plupart du temps, la petite phrase murmurée à l'oreille, c'est « allez, va chercher ! »…la variante étant, pour les plus motivés : « ATTAQUES !».

Et les voilà parties, la bave aux lèvres, le regard hagard, tremblantes d'excitation, soudain grisées par ce souffle soudain de liberté … dans ces dédales de tranchées branchées, artères artificielles de ce temple de la consommation, érigé dans le seul but de faire banquer les cons sans sommation.

Pour la deuxième espèce d'homme commence alors un long martyr, dont quelques uns rechaperont, certes, mais traumatisés à jamais. Je n'oublierai jamais mes parties de slalom entre ces missiles de croisette à tête chercheuse ayant échappé à tout contrôle de guidage…pouvant frapper n'importe quoi, n'importe où …autant d'armes de séduction massive qui devraient être interdites par la convention de Geneviève (de Fontenay, j'entends).

L'homme est ici en territoire ennemi et inconnu. Il suffit de le voir baisser les yeux, s'approcher craintivement des bacs, la main tremblante, avec la prudence et l'hésitation du chien battu quand on lui tend un steak …. Il réfléchit avant de prendre, en somme. Il n'y va pas comme un bourrin : il tâte le terrain, évalue le danger, cherche les pièges ….

Mais on a beau avoir pris toutes les précautions, on n'est pas pour autant à l'abri d'une attaque surprise.…Pour preuve :

Ayant repéré sur le stand mexx une étagère encore debout, j'entame une période de 5 bonnes minutes de reconnaissance ( champ dégagé, personne en vue, vendeuse 1 occupée au téléphone, vendeuse 2 le dos tourné, vendeuse 3 en train de se faire draguer par un gros lourd, etc.. ).

Une fois le périmètre sécurisé, je décide de m'approcher en faisant des cercles concentriques, de plus en plus rapprochés de la cible, l'air de rien…un peu comme la gazelle qui s'approche de l'étang …mais surtout pas comme le chat qui fonce sans réfléchir, la serviette au cou, les yeux fermés et la gueule ouverte, comme un gros con, droit sur sa gamelle…
Parvenu devant mon étagère, je commence à frétiller en apercevant quelques fringues sympas. Et au beau milieu, mon coup de cœur : une chemise en toile sans inscriptions, sans couleurs fluo, sans boutons ni poches partout, un truc mettable donc. Evidement, gagné par l'émotion d'avoir trouvé une chose qui me plaise, j'avais baissé ma garde …erreur fatale. En période de soldes, quand on trouve un truc bien, il faut le cacher tout de suite …le protéger en l'entourant de ses bras, et en montrant les crocs…

Mais non, moi, comme un jeune chiot tout fou, il a fallu que je le lève bien haut pour mieux le voir à la lumière …
L'attaque a été fulgurante. Je n'ai rien vu venir. Une seconde après, j'avais toujours les bras en l'air …mais je n'avais plus rien dans les mains !
A côté de moi une horrible bonne femme tournait et retournait ma chemise dans tous les sens de ses doigts crochus, très concentrée, sans un regard vers moi, comme si de rien n'était. Dans ma tête, je me dis « non, mais j'hallucine, j'ai pas rêvé là ? elle vient de me l'arracher des mains, cette malade ?... »

- ca va madame, vous vous sentez bien ?
- Quoi ? qu'est-ce-ki ya ?
- Ca vous arrive souvent d'arracher les choses des mains des gens comme ca ?
- Oui, ben faut se décider hein …ca fait une heure que vous le regardez. Moi je suis pressée, hein, on prend ou on prend pas, mais on n'hésite pas, hein, faut penser un peu aux autres …
- ……(silence, toujours sous le choc)
- …..(silence, regard méprisant et provocateur)

Visiblement, avec mon air de garçon bien élevé, tout ca, je n'ai aucune chance. C'est alors que me reviennent à l'esprit les reportages sur les cités ….

- Ta race !……ma main dans ta gueule ou mon pied dans ton cul, côônnasssse ?
- Oh !! Ca ne va pas non ? faut vous faire soigner hein …
- Allez casses toi p'tite conne…

Cà c'est le Président de la République Française qui me l'a soufflé … ; des centaines d'années de littérature, d'histoire, de guerres en héritage pour construire notre cher pays…alors qu'en fait il suffit d'un « casses toi p'tit con ». Trop des loosers nos ancêtres. (certains me répondrons que ce n'est pas pire qu'une candidate aux élections allant dire en chine « c'est bien chez vous, la justice au moins elle est rapide » )…certes, de deux boulets, il faut choisir le moindre. Mais revenons à notre mégère.

Elle rejette la chemise dans un bac et s'en va en lâchant « j'en veux pas, de toute façon c'est moche et c'est cher ». Fou de rage, et rouge de honte en imaginant les regards tournés vers moi, je tourne lentement la tête pour affronter la foule …sauf que personne, absolument personne ne me regarde.
Les gens s'en foutent, tout simplement. Blasés. Ou plutôt ils sont trop occupés à protéger leur propre périmètre. On ne leur fait pas, à eux, le vieux truc de la diversion …

Rassuré, je décide de récupérer ma chemise dans le bac. Trop tard. Un type grand et bien gras, tout ce qu'il y a de plus beauf, s'en est déjà emparé. La petite scène de tout à l'heure n'a pas dû lui échapper. Et dans son petit crâne de chat de gouttière bien con, il a dû se dire qu'une chemise qui déclenche une baston, forcément, il faut s'en emparer. Il doit être comme tout ces gens sans goûts, incapables de choisir par eux-mêmes, et qui espionnent les autres pour faire comme eux. La race des sangsues quoi …sauf que ma chemise c'est une taille « M », connard ! tu rentres même pas ta tête d'abruti dedans, t'es aveugle ou quoi ?
J'attends donc qu'il finisse par comprendre et qu'il repose l'objet de mon désir quand j'aperçois soudain sa main droite tenant un ignoble sandwich Grec gras et dégoulinant, penché dangereusement au-dessus de ma future acquisition. En y regardant de plus près je me rend compte que c'est foutu : ses doigts pleins de sauce et de gras ont entièrement maculé la chemise. Une envie de meurtre s'empare de moi. J'imagine ce porc, éventré sur le bac, les tripes à l'air, en train d'agoniser, ma chemise enfoncée dans son gosier, et son kebab planté dans l'anus.

Complètement abattu, je m'apprête à m'éloigner lorsque mon regard tombe en arrêt sur la vendeuse numéro 2, de dos toujours, mais accroupie, ses fesses de déesse émergeant de son taille basse, avec la raie presque complète décorée d'un petit string en dentelle trop mignon.
Le choc passé, je me rends compte que la moitié des mâles du magasin (alertés et attirés là par un mystérieux signal ancestral) ont eux-aussi l'œil rivé sur le cul de la demoiselle, mais eux ils ont l'air de gros pervers super lubriques,… pas comme moi.

Choqué et gêné pour la donzelle, je décide de la prévenir, la pauvre…

- mademoiselle ?
- Oui monsieur ?
- Je pense que votre pantalon se fait la malle …je préfère vous prévenir..
- Et vous n'avez que ca à faire de mater mes fesses ?
- Mais heu…

Et voilà, une fois encore, engourdi par la frénésie ambiante, je n'ai pas réfléchi.
Mais EVIDEMENT qu'elle le sait, couillon ! Elles adorent se faire mater, mais elles n'aiment pas qu'on leur dise …et du coup, de tous, le seul enfoiré …c'est moi !!

Totalement vidé, je décide finalement de battre en retraite. Mais, comme disait Rommel : « ce n'est pas une retraite, c'est une progression dans une autre direction ». Je m'enfui donc comme un lâche en courant ventre à terre vers la sortie.

Je ne m'attarderai pas sur les 7 poussettes qui m'ont écrasé les pieds, sur le couple obèse de 60 ans qui achète un string sado-mazo pour monsieur devant une vendeuse hilare. Et surtout je passe sur le coup de pompe que j'ai filé à la vieille lubrique qui matait les cabines d'essayage pour hommes. J'ai une pensée émue, par contre, et je vous demande une minute de silence, pour cet homme, ce frère d'arme, aussi paumé que moi, en larmes ….en train de faire la queue devant la seule caissière équipée d'un badge « stagiaire », qu'il n'avait évidement pas vu.

Un petit mot sur la porte que je me suis pris dans la gueule, quand même, pour vous prévenir que pendant les soldes elles ne s'ouvrent que dans un sens..
Je passerai enfin sur l'épisode où je me fais plaquer au sol par le vigile, qui trouvait que je partais un peu trop vite pour être honnête.

Ya pas à chier, faut vraiment que je me trouve une gonzesse …

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